J9 – Fixer son attention sur ce qu’on peut influencer

Bonjour à tous,

Ce matin, juste avant le lever du soleil ☀️

Côté navigation, je suis maintenant à plus de 400 M du point le plus au Sud-ouest que j’ai atteint dans ce périple (mardi midi) – mais encore à 630 M de Nieuport en route directe.

J’ai été donc été assez lent sur ce grand bord de 400 M, ayant traversé plusieurs zones de vent très faible – il fallait traverser une dorsale anticyclonique bien établie.

Éloge du temps long

Les prévisions pour les jours à venir présagent que je devrais avoir du vent en continu jusqu’à Nieuwpoort – je croise les doigts qu’il soit aussi favorable en direction que possible ! Mais a priori je devrais rester sur le même bord avec plus ou moins les mêmes réglages jusqu’à la fin d’après midi du 25 août, soit dans plus de 72h.

Un très long « speed-test » comme on dit : pas grand chose d’autre à faire que de retoucher régulièrement les réglages des voiles, choquer quelques cm d’écoute, les reprendre un peu plus tard, au gré des variations du vent.

C’est une sacré différence par rapport à tout le reste de ce parcours jusqu’à présent, où j’ai dû manœuvrer finalement assez fréquemment, changer de voile d’avant (trinquette, génois, gennaker…), prendre un ris dans la grand-voile, le larguer, etc.

Cela me laisse du temps pour me reposer, préparer la suite de la navigation, échanger avec ma famille et mes amis, et juste contempler la mer !

Je réalise la chance que j’ai de pouvoir prendre ce temps long, et j’essaie d’en profiter un maximum – car je sais que dans quelques jours ce sera le retour à la vie de terrien et son rythme trépidant.

Choisir où mettre son attention

Sur le plan personnel plus intime, ce périple me permet chaque jour d’en apprendre davantage sur qui je suis, comment je fonctionne, notamment en dehors de ma zone de confort (ah ben c’est pas trop tôt, à l’approche de la cinquantaine).

J’ai une très profonde tendance à vouloir tout contrôler, maîtriser, et à terre j’ai une assez grande confiance sur le fait que tout problème a une solution et que j’arriverai sans aucun doute à en trouver une. Et ce sans avoir à stresser à l’avance, la plupart du temps.

En mer, les premiers jours en solo je n’étais vraiment pas très bien, stressé par le fait qu’un trop grand nombre de paramètres risquaient d’échapper à mon contrôle et me faire défaut sans que je puisse y trouver facilement une solution. Par exemple, après avoir fait 2h de moteur pour essayer de traverser une zone de molle bien trop large, j’ai eu un doute concernant ce fameux moteur et j’ai passé pas mal d’énergie à vérifier ce que je pouvais dessus – sans lui trouver quoi que ce soit d’inquiétant au final. J’ai par ailleurs les pièces d’usure principales en plusieurs exemplaires de rechange à bord, ainsi que de l’huile et du liquide de refroidissement. Donc, là dessus je suis bon – mais j’y ai développé quand même pas mal de stress inutile… Aie confiance !!

Le petit moteur (11ch) de La Promesse. Le gros boîtier blanc c’est l’alternateur qui permet de charger les batteries. Il est bien caché juste sous le fameux fauteuil – je vous garantit que lorsque le moteur tourne, pas moyen de l’oublier !!

À ce moment j’ai reçu une réponse tout à fait adaptée à ma question « je suis dans un calme plat, qu’est-ce que je fais ? » que j’avais envoyée à mon ami Nicolas (qui a traversé tous les grands océans du monde sur un bateau bien moins rapide que le mien) : « ben tu es en nav océanique et tu ne vas pas pouvoir tout faire au moteur »

C’était tellement vrai, j’en ai rigolé et je me suis dit que j’étais un peu ridicule avec mes angoisses !! Merci Nico de m’avoir remis à ma place !!

En y ré-réfléchissant, je crois que cette aventure océanique en solitaire me donne une opportunité unique de travailler sous contrainte forte sur une de mes faiblesses : j’ai clairement tendance à m’attacher à des considérations sur lesquelles je n’ai pas ou peu de prise, d’impact. Ceux qui me connaissent sur les plans personnels ou professionnels comprendront certainement avec des exemples précis.

Et Tous Capables là dedans ?

Quand j’ai réfléchi à ce projet, et que j’ai choisi de soutenir la cause des enfants non-oralisants (qui ont des difficultés à parler), j’avais bien en tête de choisir une cause sur laquelle je pourrais avoir, à mon échelle, un impact quand même significatif.

Vous connaissez tous mes engagements, mes positions en faveur du climat (avec par exemple l’animation d’ateliers Fresque du Climat), de la protection des océans : j’aurais bien sûr pu naviguer sous ces couleurs – mais quel aurait alors été mon impact face à la démesure de ces enjeux.

Si j’ai choisi de me donner pour objectif de sensibiliser un maximum de personnes à la cause de l’impératif de présumer des compétences de ces enfants qui ont tant de difficultés à justement montrer leurs compétences, c’est parce que j’ai le sentiment qu’il s’agit davantage d’une nécessité de prise de conscience plus large de cet enjeu dans la société : les solutions sont connues et existantes, il s’agit de les mettre en œuvre, et que chacun en ait conscience. Nous avons tous autour de nous une famille qui est touchée de près ou de loin par ce type de handicap pourtant tant invisibilisé…

Chaque personne sensibilisée grâce au vecteur puissant de la course au large en solitaire devient à son tour un ambassadeur de cette cause.

Alors oui, j’espère avoir choisi une cause pour laquelle je pourrais avoir un impact significatif – mettre mon attention sur une problématique sur laquelle je peux avoir prise. À mon humble échelle bien évidemment. Et avec tout mon respect pour ces enfants qui méritent notre attention, leurs familles, et les professionnels qui essaient de les aider, avec des moyens toujours insuffisants.

Merci de votre soutien et de vos encouragements !

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